En effet, préalablement à cette réforme, la commune devait se conformer à l’avis du fonctionnaire délégué délivré préalablement à la décision de la commune. Cet avis conforme permettait, de manière aisée, à la commune de pouvoir se justifier aux yeux des demandeurs ou des tiers.
Depuis la réforme entreprise, l’avis conforme n’est plus visé que par l’article 109 du CWATUP, c’est-à-dire lorsque le permis concerne des biens immobiliers inscrits sur la liste de sauvegarde, classés, situés dans une zone de protection visée à l’article 209 ou localisés dans un site repris à l’inventaire des sites archéologiques visés à l’article 233.
Hormis cette exception, l’avis du fonctionnaire délégué en matière d’urbanisme n’est plus qu’un avis simple de légalité et d’opportunité.
Cela signifie que le collège échevinal peut s’en écarter à la condition de motiver les raisons en fait ou en droit qui le conduisent à s’en écarter (document parlementaire wallon n° 309, 2001-2002).
L’exigence de motivation concerne tous les actes administratifs de portée individuelle comme le rappellent les articles fondamentaux de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs :
« Article 1 : L’application
Pour l’application de la présente loi, il y a lieu d’entendre par :
- Acte administratif : l’acte juridique unilatéral de portée individuelle émanant d’une autorité administrative et qui a pour but de produire des effets juridiques à l’égard d’un ou de plusieurs administrés ou d’une autre autorité administrative.
- Autorités administratives : les autorités administratives, au sens de l’article 14 des lois coordonnées sur le Conseil d’Etat.
- Administré : toute personne physique ou morale dans ses rapports avec les autorités administrative.
- Article 2 : les actes administratifs des autorités administratives visés à l’article 1er doivent faire l’objet d’une motivation formelle.
- Article 3 : la motivation exigée consiste dans l’indication, dans l’acte des considérations de droit et de fait servant de fondement à la décision. Elle doit être adéquate. »
Par le passé, dans le cadre de la vie conforme, il était facile pour une commune de procéder à la motivation en reproduisant purement et simplement l’avis conforme du fonctionnaire délégué.
A ce jour, la reproduction de l’avis simple du fonctionnaire délégué peut être également suffisante pour autant qu’il réponde aux exigences formulées par le Conseil d’Etat.
A cet égard, il y a lieu de relever deux arrêts récents :
- Conseil d’Etat 26 juin 2006 - n°160.544 – VANTOMME C/ ESTAMPUIS :
« Considérant que la motivation, par référence à un avis, est admise pour autant que cet avis soit reproduit dans l’acte attaqué ou annexé à celui-ci et qu’il soit lui-même suffisamment et adéquatement motivé ;
Que la motivation des actes administratifs soumis à l’obligation de motivation formelle doit répondre à une double exigence : elle doit non seulement permettre au destinataire de l’acte de comprendre les raisons qui ont amené l’autorité à adopter celui-ci et elle doit en outre permettre au Conseil d’Etat de contrôler l’exactitude, l’admissibilité et la pertinence des motifs dans la décision ;
Que les motifs exprimés dans un acte administratif doivent être exacts et reposer sur des éléments du dossier administratif ;
Que celui-ci doit permettre de vérifier que les éléments retenus ne sont pas manifestement inexacts ou contraires à la réalité ; »
- Conseil d’Etat 25 janvier 2007 – n° 167.144 – HORELBEKE C/ VILLE DE NAMUR
« Considérant par ailleurs que l’acte attaqué ne répond pas non plus aux objections soulevées lors de l’enquête publique ;
Que l’argumentation de l’intervenante ne peut être suivie lorsqu’elle prétend que ses motifs sont contenus dans l’avis du collège des Bourgmestre et Echevins du 8 novembre 2005, lequel est visé dans l’acte attaqué ;
Qu’en effet, il y a lieu d’admettre la conformité d’une motivation par référence par rapport aux articles 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1991, c’est notamment à la condition que l’avis auquel il est fait référence soit reproduit in extenso dans l’acte attaqué ou ait été porté à la connaissance de son destinataire au plus tard le jour de la notification de l’acte qui cause grief ;
Que tel n’est pas le cas en l’espèce ;
Que le premier moyen est sérieux ; »
On peut retirer plusieurs enseignements de cette jurisprudence récente confirmant les jurisprudences antérieures du Conseil d’Etat.
Tout d’abord, la prudence recommande de reproduire in extenso l’avis du fonctionnaire délégué ou tout autre avis de toute autre administration pertinent pour la décision (par exemple : division forêt et nature, ministère de l’équipement et des transports,…).
Si le texte de ces avis n’est pas reproduit in extenso, il doit à tout le moins être annexé et faire corps avec la décision transmise pour permettre à son destinataire de prendre connaissance de ce qui est un élément essentiel de la motivation.
Ensuite, il est également recommandé de vérifier que l’avis reproduit ou auquel il est référé réponde bien à toutes les observations formulées soit dans le cadre d’enquêtes publiques ou aux éléments qui figureraient dans la notice d’incidence.
En effet, parfois les avis ne se suffisent pas à eux-mêmes.
La motivation est donc un élément essentiel qu’il faut préparer soigneusement afin d’éviter des recours soit de la part du demandeur soit de la part de tiers. Il ne faut pas oublier, à cet égard que, conformément à l’article 119 du CWATUP, les tiers sont exclus du recours au Gouvernement Wallon, ce qui implique automatiquement de leur part une procédure au Conseil d’Etat extrêmement lourde pour les communes.
En résumé :
1) de préférence reproduire in extenso les avis de toutes les autorités permettant de compléter la motivation
2) répondre à tous les arguments et objections soulevés dans le cadre de la procédure en complétant au besoin les avis par une motivation adéquate